Amadou présente : The Troubleshooters/les risque-tout

Les lectures rôlistiques d’Amadou

Chroniques des coups de cœur rôlistique d’Amadou, un JdR en 8000 caractères,

MJ : Bien, votre train vient de vous laisser en gare. Avec vos bagages encombrants, vous vous trainez jusqu’au parking. Une 2CV décapotable flambant neuve se gare, une bonne sœur au volant.

Joueur : A ouais, dans le genre cliché… Et il y a un gendarme en kaki aussi non ?

MJ : Ouais, il a le regard plongé dans le vide et fait tourner sa matraque.

Joueur : Ah… Ok… bah, on monte…

MJ : Aie, c’est une 2CV, vous n’entrerez jamais à 5 avec vos bagages. Que faîtes-vous ?

Joueur : Sérieux ? C’est ça ton dilemme scénaristique ? Pas arriver à entrer avec nos bagages ? Bah tiens, j’utilise tes règles là et hop, je fais venir un taxi ! Boum !

MJ : Parfait, le taxi se gare. Tu entres. Un attaché case est oublié sur le siège arrière. Il y a le logo de l’ambassade de l’Arenwald. Des documents confidentiels sur un risque d’invasion par la Sylvérie !

Joueur : Non mais @^ »{~é !

MJ : Comme tu dis !

Joueur : Quoi, j’peux même plus injurier ?

MJ : non, mon gars, tu es dans une BD »

 

Quoi qu’on en dise, le JdR est d’abord un loisir de lecture, et un JdR est surtout un livre. C’est même le cœur du travail de maître de jeu : lire, comprendre et s’immerger. 

Lire un livre de JdR pour moi n’est pas une lecture comme les autres : difficile de se lancer dans une autre lecture après. Des idées, des images et des émotions me traversent. J’ai envie de les partager, avec vous. 

 

Dans cette chronique, je vous propose le compte rendu d’une lecture d’un ouvrage de JdR en 8000 caractères environ : plaisir de lire, immersion dans les illustrations et sentiments à la lecture. 

 

Mon but : poser en quelques mots ce que provoque la lecture d’un livre de JdR. 

 

LE PRODUIT

« The Troubleshooters/les Risque-tout », un jeu de rôle d’action et d’aventure dans le plus pur style des BD franco-belge, de Kristen Sundelin, édition française : Arkhane Asylum, 234 pages.

 

PITCH

Attention à vous : ramasser une valise qui n’est pas la vôtre à l’aéroport risque de vous obliger à démêler un complot visant à renverser le gouvernement de votre lieu de villégiature.

 

Nous jouons dans des années 1960 de « carte postale », de bande dessinée. Une vaste organisation, la Pieuvre, ourdit dans l’ombre. Des aventuriers rencontrent, plus ou moins par hasard, ces manigances. Ils démêlent les complots et y affrontent les agents tentaculaires dans des aventures haute en couleur. Bref, une vraie BD comme les Spirou et Fantasio ; Tif et Tondu ; Yoko Tsuno ou des séries de film comme les premiers James Bond (avec Sean Connery) ou Fantomas…

La guerre froide, l’archéologie avec un soupçon de mystique, la technologie fantasmée et colorée des 60’s, un optimisme réjouissant sur le futur et l’humanité : voici les toiles de fond de cet univers.  Bref, embarquez dans un Concorde pour un pays aussi délicieux que Al-Ansur, confondez votre valise avec celle d’un terroriste à l’aéroport et aidez le Cheik à déjouer un complot visant à le détrôner. Attention à vous : ramasser une valise qui n’est pas la vôtre à l’aéroport risque de vous obliger à démêler un complot visant à renverser le gouvernement de votre lieu de villégiature.

 

ON JOUE QUOI ?

 Ah, plus j’empile les références, plus je réalise à quel point cette proposition de jeu est juste jouissive… C’est un peu la télé de mon enfance qui défile dans les pages (oui, je regardais beaucoup de rediff).

Les personnages sont définis par des compétences et des capacités/talents, l’ensemble regroupé dans des « archétypes » très stéréotypés. C’est assez normal, le monde de la BDs de cette époque-là est stéréotypé et après tout, c’est ce qui va créer les situations intéressantes ! Espionne, artiste incompris, ingénieur génial, savante folle, vieux baroudeur, archéologue ou monte en l’air élégante : tout y passe.

Le jeu suggère une session de création collective, nécessaire pour éviter un groupe tellement disparate qu’il ne pourra pas fonctionner. Le système incite à une spécialisation des personnages dans un ou deux domaines. Les équipes pourront ainsi rappeler les meilleurs moments de Mission Impossible, Chapeau Melon et Botte de Cuir, Man from UNCLE, Max la Menace… Ah, plus j’empile les références, plus je réalise à quel point cette proposition de jeu est juste jouissive… C’est un peu la télé de mon enfance qui défile dans les pages (oui, je regardais beaucoup de rediff).

 

DANS LE CAMBOUI

 J’ai vraiment pris plaisir à consulter et lire ces gadgets très simple (pistolet, costume, voiture, maillot de bain…) et voir comment l’auteur les intègre à son jeu.

C’est un système qui semble lui aussi surgit du passé : un d100 avec une grille des compétences, sans caractéristiques. On y trouve juste ce que sait faire le personnage. Prenez deux dés 10 pour un test de pourcentage et hop, l’action est valide ou pas. L’auteur tente quelques modules pour jouer autour de ce duo de dés 10. Selon la situation, des PiP (oui oui, comme l’écureuil de Spirou) facilitent ou complexifient le test. Il faut alors lire d’abord le chiffre des unités et après le résultat en pourcentage si cela n’est pas encore bon. Beau joueur, l’auteur propose aussi de revenir au classique +/- 10% ; plus facile à lire mais moins marrant.

Plus sympathique, l’auteur propose un système de point de récit. Ils sont un peu la clé de la réussite : ils permettent d’intervertir les deux dés 10 lors du test de pourcentage ; ils permettent d’utiliser les talents et capacités des personnages et ils permettent aussi d’utiliser les capacités des outils et des gadgets, l’excellente trouvaille du jeu ! C’est tellement 60’s ce culte des gadgets avec des dessins aussi mignon ! J’ai vraiment pris plaisir à consulter et lire ces gadgets très simple (pistolet, costume, voiture, maillot de bain…) et voir comment l’auteur les intègre à son jeu. Un lien direct entre ce que le lecteur voit et comment il l’utilise en jeu. Je donne ma mention spéciale pour cette idée ! 

 

PLAISIR DE LECTURE

Pour jouer dans une des capitales proposées, vous avez autant d’informations que les quelques bulles de Tintin vous décrivant la Syldavie ou le pays des Arumbayas. C’est dans l’esprit quoi.

 

Le travail de mise en page est excellent ! Les textes se lisent vite et les points de règles sont souvent expliqués par des échanges de dialogues entre les personnages « iconiques ». Le lien avec la BD vient servir le discours et l’explication. L’humour est omniprésent et quelques informations sur l’univers du jeu sont distillées ainsi. Les chapitres sur l’histoire du monde légèrement adaptée de ces années 60’s sont agréables. La France et le Japon sont alors au top de leur influence mondiale ! En fait, je dirais que les descriptions sont un peu rapide. J’aurais aimé avoir plus de matière pour incarner la « Pieuvre », comprendre ses motivations et ses moyens. Cela dit, pour jouer dans une des capitales proposées, vous avez autant d’informations que les quelques bulles  de Tintin vous décrivant la Syldavie ou le pays des Arumbayas. C’est dans l’esprit quoi.

Bon, je pointe un petit bémol quand même. Certains points de règles sont complexes parce qu’assez mal expliqué je trouve : notamment le découpage d’une scène d’action en « zone ». Je pense que l’idée était de faire référence à une série de case de BD mais cela hache les actions de façon peu réaliste. Un MJ avec un peu de bouteille (choisissez l’alcool qui va le mieux…) saura improviser ou s’en écarter.

 

PLAISIR DES YEUX

 Pitié, les auteurs, dessinez ! dessinez ! et encore dessinez ! Des cartes, des plans, des paysages, des PnJs : ça nous fait voyager !

C’est la grande force de ce livre de règles. Des scènes, des visages, des objets, des paysages… J’ai vraiment eu l’impression d’ouvrir un vieux Tif et Tondu ! D’ailleurs, j’ai rouvert des vieux Tif et Tondu. Bravo aux auteurs, vous êtes dans une BD, le livre est presque une BD, les gadgets sont tout droit sortis d’une BD. Ça transpire l’amour de ces univers, l’« iconisation » des plaisirs de cette époque (oui, les trucs sympas des années 60, en écartant les inégalités, la guerre coloniale, le racisme, les dictatures…).

En fait, je reste même sur ma faim. Cet univers est tellement coloré et connecté aux illustrations qu’on aurait envie d’avoir des centaines de paysages, cartes, plans et PnJ pour animer ses parties ! On se sent tellement étriqué avec nos battlemaps numériques. Pitié, les auteurs, dessinez ! dessinez ! et encore dessinez ! Des cartes, des plans, des paysages, des PnJs : ça nous fait voyager !

L’écran du jeu plonge dans cette ambiance « base des méchants » avec une foule de détails à voir. Bon, c’est un trois volet (moi, je n’aime pas…) mais le contenu fait le travail.

 

ALORS ? BIEN OU BIEN ?

Je crois que la chronique répond bien à la question. Oui, Troubleshooters n’est pas exempt de défauts. Ce n’est pas le système de règles de la décennie. C’est « un jeu d’ambiance » mais quelle ambiance ! C’est le moyen de passer des scénarios agréables, quasiment feel good, qui replonge en ces temps où l’humanité pensait aller vers le mieux… Oui, juste avant les crises économiques.

Et rien que pour ça, je dis merci et bravo.

 

CONCLUSION

Un petit livre de règles, un univers très agréable, des aides de jeu qui ne sont pas indispensables mais qui apportent tellement à l’immersion. Bref, un jeu avec lequel on joue avec le sourire.

Un kit gratuit de démonstration est disponible depuis longtemps. Testez-le, faîtes vous plaisir.

Et n’hésitez pas à regarder l’avis des vrais critiques sur Youtube. 😉

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Écrit par Sébastien Fajal

Professeur certifié de l'enseignement secondaire
Animateur de Club de Jeux de rôle
Auteur chez Casus Belli Magazine
Auteur chez d1000etd100

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