Waouh !Waouh !

Amadou présente : lectures et jeux d’été 2023

Les lectures rôlistique d’Amadou

Dans cette chronique, vous avez pu suivre mes récentes lectures rôlistique, du moins celles qui m’ont donné envie d’écrire. L’été venant, je vous propose mes lectures à glisser dans le sac de voyage pour accompagner vos aventures à la plage, la montagne ou autre lieu de villégiature. L’été, c’est ce moment délicieux où on pense avoir du temps !

Je vous propose un jeu ; une BD et un livre. Et surtout : un bel été à vous !

 

Le rôliste et le conjoint à la plage :

-T’as pensé à la crème ?

– Euh non, mais le soleil est moins fort là ?

– T’as pris un goûter pour les petites ?

– Non, mais regarde, il y a un vendeur de chouchou et de beignet !

– Bien sûr… c’est équilibre au moins…. Et la trousse à pharmacie ? Tu y as pensé ?

– Ah, ça prenait trop de places…

– BON ! t’as pris quoi dans ce gros sac que tu traine en pestant depuis la voiture ?

– Le bestiaire de DD5 parce que j’ai un scénar à préparer ; Hunter parce que j’ai envie d’une campagne à la rentrée ; Sortir de l’auberge des Lapins Marteaux pour les conseils ; j’ai pris le dernier Casus parce qu’il y un scénar sympa et une bd pour passer le temps.

– T’es au courant qu’on part dans une heure ?

 

 

 

UN JEU A DEUX : DISTRICT NOIR, un jeu de carte pour deux de Nao Shimamura et Nobutake Dogen, illustré par Vincent Roché et édité chez Spiral Editions

Des parties qui s’enchaînent, des jeux de regards, du bluff : oui, vous allez vous fâcher avec votre adversaire !

 

LE PITCH : 1954, Hoboken, les mafias New Yorkaise s’affrontent pour prendre le contrôle de la ville : faveurs, soutiens, coups bas et quartiers sensibles sont l’objet des tensions et des manœuvres pour s’en emparer.

 

 

LA FORME : C’est un jeu de carte simple à comprendre. Chaque joueuse et joueur a 5 cartes en main et doit les poser à la suite d’un flop. Une fois par manche (il y a en 4 par partie), chaque joueur peut ramasser les cinq dernières cartes posées. Il tente alors de collecter suffisamment de cartes soutiens, d’atouts et le moins de malus pour remporter la partie lorsqu’on comptera les points à la fin. Trois cartes « lieux stratégiques » sont en jeu : celui qui parvient à les récupérer toutes les trois gagne automatiquement.

LE VISUEL : Avec des dessins en noir et couleur, l’ambiance ténébreuse et sulfureuse de cette cité du crime est parfaitement dépeinte. Les cartes sont comme des lames de tarot, les couleurs vives identifient facilement les différents soutiens. Boxeurs, assassins, politiques… Si je devais un jour découvrir un univers de jdr sur cette ambiance-là, je révérais de ces illustrations !

 

LE FOND : Les parties s’enchaînent vite : comptez dix à quinze minutes. Les adversaires s’observent avec méfiance, hésitant constamment entre ramasser les cartes malgré le malus d’une d’entre elle ou attendre au risque que l’autre n’y ajoute une crasse ou ramasse. Sachant que vous ne pouvez ramasser qu’une fois, la tension est palpable. Avis aux compteurs de cartes, ça ne va pas vous avantager trop car dès le début de la partie, trois cartes au hasard sont enlevées du jeu. A cheval entre le poker et le tarot, voilà un beau jeu pour animer les apéritifs ou les soirées pour un coût et un poids modeste !

 

UNE BD : la série DIE, par Keron Gillens, Stéphanie Hans, Clayton Cowles ; 4 tomes édités chez Panini Comics entre aout 2020 et février 2022.

Et vous vous retrouviez piégé dans votre monde de JdR préféré ? Déjà vu ? Peut-être, mais avez-vous seulement pensé aux conséquences de vos actes de PJ pour les gens de cet univers…

 

LE PITCH : En 1991, six adolescents amateurs de JdR disparaissent lors d’une soirée sans laisser de trace. Cinq sont retrouvés deux ans plus tard errant dans une rue. Ils ont vécu une aventure digne de TRON, une immersion dans leur univers de JdR préféré. Mais, trente ans plus tard, cette aventure a laissé des traces dans les corps et les âmes. Il va leur falloir retourner dans cet univers pour tenter de mettre fin à cette partie en cours et affronter leurs propres démons.

 

LA FORME : En quatre tomes, nous suivons le retour de ces personnages dans ce monde qu’ils ont « joué » pendant leur « immersion ». Cet univers de DIE est composé de plusieurs factions, territoires ou pays qui reprennent nos inspirations rôlistique, un patchwork de nos références comme les univers improbables qu’on fantasmait ado : fantasy, cyberpunk, Steam punk… La grande force du récit est de montrer les conséquences des actions des héros sur les habitants de ce monde qui, du coup, sont bien réels ! Oui, c’est drôle de lancer une guerre entre deux empires quand on roule des dés autour d’une table… mais si vous étiez au cœur de ce champs de bataille, à voir les combats, entendre les cris des mourants et observant les charniers… Vous y réfléchiriez plus longtemps.

Les héros sont eux-aussi formidables : des quarantenaires plus ou moins loosers, ayant mené des vies qu’ils disent eux-mêmes sans éclats. Difficile de vivre sa vie d’auteur raté, de prof des écoles ou de jeune mère divorcée quand vous avez sauvé le monde, affronté des dragons et renversé des empires. Les réflexions sont belles, les répliques sèches. Le lecteur rôliste ne peut s’empêcher de transposer et réfléchir.

 

LE VISUEL : Le dessin et les couleurs sont dans l’école contemporaine des comics étatsuniens. Il y a du mouvement, des émotions, de l’élégance dans les personnages. Les codes sont là, transposés dans la fantasy ; jouant avec les variations des visages. C’est beau, ça se dévore. Le cœur du dessin, et de l’histoire, ce sont les dés. Chacun des personnages possède un dé (d4, d6, d8, d10) qui détermine sa classe et donc ses pouvoirs. Chacun est connecté à sa personnalité. Les dessinateurs jouent beaucoup avec ces dés pour les faire figurer sur les tenues, les pouvoirs, les objets et représenter ainsi la fusion entre le joueur et le personnage.

 

LE FOND : Non, cette BD ne nous parle pas de délire de GN extrême. Ces héros ne terrassent pas des dragons pour le plaisir ou les XP. Ils sont tels des divinités qui ont façonné un monde et qui peuvent voir comment leur « moment de folie adolescente » ont bouleversé la vie des habitants. Et chaque étape de leur voyage est une plongée dans leur vie respective, ressassant leur échec, leurs doutes et leurs regrets. Une mention spéciale pour le personnage de Dominic-Ash ; un homme incarnant un personnage féminin dans le jeu. Attention gentil spoil, à un moment de l’histoire, cet homme qui n’a pas d’enfant dans la vie réelle est confronté à celui que son personnage, donc lui quelque part, a eu en tant que mère.

Les émotions bouleversent ces personnages et nous aussi. C’est un classique de BD que tout rôliste avec un peu de bouteille devrait lire pour réfléchir sur sa façon de jouer.

 

 

UN LIVRE : METRO PARIS 2033 de Pierre Bordage, 2020-2022, trois tomes aux éditions Atalante et Livre de poche.

Même avec la fin du monde, l’humanité trouve le moyen d’être pire qu’ignoble dans l’étroitesse et les couloirs du métro parisien.

 

LE PITCH : La fin du monde a eu lieu, on ne sait pas trop comment. Des survivants se sont réfugiés dans les couloirs du métro parisien : la surface étant devenue inhabitable. Les années et les générations passent, des communautés se forment et s’organisent dans les stations avec des modes de fonctionnement plus que terrifiant… Il y a là des mandars, des milices qui exercent une violence excessive sur la population et imposent une justice dévoyée mais qui assurent la sécurité et la survie de dizaines de milliers de survivants ; un culte théocratique nommé Elévation qui condamne tout ceux qui sont différents à être enfermés dans des cages et élevés à la surface pour y périr… Des mutants naissent et sont l’objet de rejet et de violences… Toutes ces communautés semblent nées des pires systèmes que les humains ont pu inventer dans l’histoire.

 

LA FORME : Les trois tomes racontent les épopées de plusieurs personnages solaires qui par leurs actes vont influencer, et transformer ces statiopées. Il y a là Madonne, cette femme aux idéaux de liberté et d’égalité, une icône révolutionnaire ; souvent victime de ses passions et désirs à l’attention des jeunes hommes. L’ignoble pasteur Parn, haut prêtre de la religion Elévation, un vieil homme libidineux, cruel mais redoutable politicien. Juss et Plaisance, deux adolescents fuyant ces statiopées sanguinaires et explorant, avec la candeur et la vigueur de la jeunesse, les autres rives… De multiples autres portraits sont ainsi brossés, des gens avec leurs envies, leurs désirs, leurs excès et souvent ; leurs morts terribles et parfois salutaires. En fait, si le monde ne voit plus la lumière, tous s’enferment dans leurs esprits et basculent dans des extrémismes de tout bord.

 

LE FOND : Les sujets chers à l’auteur sont abordés : l’extrémisme religieux, le recours à la violence, l’ignorance, la perte de sens des choses… Et au fil des pages, des discours, des actions, des espoirs, des drames. Ce monde est peu à peu à train de sombrer (à nouveau) car les ressources sont épuisées ; les couloirs sont surpeuplés ; les eaux montent et les milices politiques redoublent de violences pour maintenir leurs privilèges.

Attention, les pulsions humaines décrites par Bordage sont à leurs sommets : sexe brutal, meurtre ignoble, exécution spectaculaire et injustifiée… Puis, dans les autres tomes, le lecteur explore d’autres stations Rive Droite, dites abandonnées, dans lesquelles des communautés sont retournées dans une forme de sauvagerie.

Et, magie de Paris, l’ensemble de sang, bruit, fureur et désir mène peu à peu le lecteur vers un dénouement plus lumineux. Beaucoup ne verront jamais cette lumière, fauché, torturé, pendu, dépecé…

 

Comparons rapidement avec la version originale, le Metro 2033 de Dmitry Glukhosky. Là où dans la version russe, le héros parcourt l’univers en restant stoïque et concentré sur sa mission ; ici, les émotions et les sentiments déchirent les personnages et les poussent à commettre des actes extrêmes. Bordage est plus charnel là ou Glukhosky est descriptif.

 

 En fait, l’apocalypse était loin d’être la pire chose qui puisse arriver à l’humanité.

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Écrit par Sébastien Fajal

Professeur certifié de l'enseignement secondaire
Animateur de Club de Jeux de rôle
Auteur chez Casus Belli Magazine
Auteur chez d1000etd100

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